L’année 2019 s’achève dans des contextes locaux et internationaux marqués principalement par des phénomènes de résistances au « modèle » néo-libéral. La mobilisation actuelle contre l’instauration d’un régime de retraite à point porte en elle cette contestation.
La dévastation écologique de la planète fait prendre conscience de l’enjeu majeur de cette question pour l’Humanité. De nouvelles générations sont entrées en lutte et ce au niveau international.
Se pose désormais l’impérieuse nécessité d’une alternative à ce capitalisme qui épuise les ressources naturelles et empoisonne les milieux de vie.
Les violences faites aux femmes engendrent des mouvements qui se heurtent frontalement au patriarcat et aux formes de domination de cet héritage archaïque.
Les revendications sociales et démocratiques bousculent au niveau international l’ordre politique imposé par la mondialisation. Partout, en Algérie, en Irak et au Chili, du Liban à la Colombie, la jeunesse, les femmes et les classes populaires refusent de se plier plus longtemps à des logiques politiques qui ne profitent qu’à des minorités de nantis.
Le contraste est grand avec les précédentes prises de pouvoir des Trump, Salvini et Bolsonaro. Cela signifie qu’une gigantesque instabilité caractérise ce néo-libéralisme que d’aucuns pensaient durablement au pouvoir. Pour autant, l’issue de ces confrontations demeure incertaine. Elle l’est, car les forces financières, économiques et politiques qui dirigent quasiment l’ensemble de la planète ne sont pas défaites. Elle l’est également par l’absence d’un projet politique en capacité d’apparaître comme une alternative.
Et c’est principalement cette question qui se pose directement aux peuples et classes sociales qui se mobilisent. Le lien entre les aspirations démocratiques et les revendications sociales est évident. Et pourtant, aucun parti ou mouvement n’est encore apparu en tant que porteur de ce projet alternatif. L’histoire est passée par là.
La conversion définitive de la social démocratie aux principes de l’économie de marché marque profondément ce qui fut la gauche. Le monde du travail s’est détourné de ce courant politique. Il ne s’est pas tourné pour autant vers les vieux partis communistes totalement prisonniers d’un passé marqué par la dictature stalinienne. En Algérie et au Nicaragua, les fronts dits de « libération » se sont transformés en systèmes despotiques, mélanges de bureaucratie et de libéralisme.
Toutes les leçons de ces dévoiements et trahisons doivent être tirées pour que puissent apparaître des outils collectifs donnant aux luttes en cours, des perspectives de changement radical.
Dans ce décor complexe, une lutte porte en elle ce qui peut être l’ébauche d’un projet novateur. La résistance kurde organisée par le PKK s’articule désormais autour d’un axe mis en actes au Rojava. Anti-étatique, le confédéralisme démocratique contenu dans le projet social de la Fédération de Syrie du Nord porte en lui les germes d’une alternative qui peut être déclinée y compris au niveau international. Cette démarche révolutionnaire se caractérise par des formes d’organisations fondées sur une démarche autogestionnaire. Elle rompt sur place avec les régimes confessionnels et dictatoriaux, mais sa portée dépasse amplement les frontières de cette région du monde.
En empruntant largement ses inspirations au cœur d’un courant libertaire, elle s’inspire également d’éléments contenus dans le paradigme de la révolution permanente.
Ce n’est donc pas un hasard si Erdogan, avec la complicité passive ou active des puissances occidentales, s’est attaqué militairement au Rojava. Avec la collaboration des milices islamistes, il tente d’étouffer dans le sang une expérience sociale, économique, écologique et politique dont il redoute la portée.
Les luttes dites de libération nationale peuvent également trouver matière à des débouchés politiques dans le projet proposé par le PKK. Cela vaut dans des zones à haut degré d’affrontement comme en Palestine, et cela pourrait être le cas également en Écosse, en Catalogne ou en Corse. En effet, se dessinent en filigrane dans le projet autogestionnaire et confédéral des perspectives qui rompent à la fois avec le néo libéralisme et les schémas étatiques.
Alors que l’hyper-consommation et des vœux aussi vides de sens vont déferler en cette nouvelle année, les militantEs et les sympathisantEs d’a Manca n’oublient pas le sort des milliers de femmes, d’hommes et d’enfants jetés sur les routes et les mers par des systèmes et des guerres dont les États occidentaux profitent amplement.
La vieille Europe dans laquelle nous vivons se transforme en bunker, misérable et criminelle réponse à un phénomène qu’elle contribue à générer.
La solidarité avec les migrants consiste bien sûr à ne fermer aucune porte, mais elle exige tout autant que soit mis un terme définitif au pillage et à l’exploitation capitaliste dont se rendent responsables des Etats, comme l’Etat francais.
Dans ce décor, notre pays, la Corse, n’échappe pas aux conséquences de ce néo-libéralisme qui ruine des pans entiers de notre société et qui transforme nos espaces naturels en marchandise à haute valeur ajoutée.
Niés en tant que peuple, nous subissons donc une double agression.
Au delà des pathétiques gesticulations qui marquent la campagne des prochaines municipales, se pose inlassablement la question d’une solution politique équitable parce que mettant la question sociale au cœur d’un projet. Équilibrée parce que porteuse d’une solution écologique, cette solution ne peut être véritablement démocratique qu’en imposant le droit à l’autodétermination du peuple corse.
Si la question sociale s’avère plus que jamais centrale, notamment par les effets d’une spéculation immobilière dévastatrice, les sorts des militants emprisonnés et des ex- prisonniers en butte au harcèlement judiciaire ne peuvent être négligés. La solution politique passe immanquablement par des mesures de libération et la cessation de toutes les formes de poursuite.
La paix que nous voulons ne relève pas d’une utopie fumeuse mais d’une impérieuse et vitale nécessité. Elle dépend d’un rapport de force, lui même fondé sur les luttes.
Les pragmatiques et les réalistes sont celles et ceux qui veulent faire des résistances la voie ouverte vers un changement aussi profond que radical. Toute autre voie est irrémédiablement vouée à l’échec.
La lutte de classe porte en elle la vitalité et l’espoir, a contrario de la morbidité étatique et néo libérale encore à l’œuvre.
Nos vœux au seuil de cette nouvelle année vont à toutes et celles qui se refusent à mettre un genou à terre et à toutes celles et ceux qui s’apprêtent à les rejoindre.
A MANCA.