Dès 2007 les scientifiques s’alertaient des conséquences du réchauffement de la Méditerranée, sans s’imaginer que le pire des scénarios serait effectif dès 2018. Dans une étude internationale très sérieuse intitulée «Nature Climate Change » diffusée en octobre dernier, le constat est sans appel : La méditerranée se réchauffe beaucoup plus vite que le reste du monde (25% d’écart de température en plus). Il existe désormais une forte probabilité que le Mare Nostrum atteigne avant 2050 la barre fatidique des 2° d’élévation de température, même de façon temporaire. Nous assistons à une tropicalisation de notre cadre de vie.
Quelles conséquences pour la Corse ?
Elles sont multiples et doivent être anticipées de toute urgence.
Les courants marins qui entourent la Corse se sont déjà réchauffés globalement de +1,4°, ce qui est presque à la limite globale des 1,5° à ne pas dépasser, limite fixée par l’accord de Paris sur le climat. Cette hausse hors norme impacte l’air et la mer. Chaque fois qu’une masse d’air froid rencontrera l’air surchauffé du bassin méditerranéen, nous connaîtrons des tempêtes de plus en plus violentes, avec toutes les conséquences qui peuvent en découler. Mais ces épisodes violents auxquels il faut se préparer ne doivent pas faire passer au second plan les effets au long terme.
La mer qui entoure la Corse se réchauffe et provoque :
– Une dilatation globale et une montée du niveau de la mer plus rapide (et incidemment une érosion du littoral plus rapide).
– Une capacité amoindrie d’absorption et de stockage de la pollution carbonée produite dans l’île.
– Une modification importante des écosystèmes marins et une remise en cause de notre chaîne alimentaire de proximité.
– L’augmentation des zones mortes (Les acides remplacent l’oxygène marin).
– Une augmentation des épisodes caniculaires (la mer ne dissipe plus la chaleur nocturne, au contraire).
L’air que nous respirons se réchauffe et provoque :
– Des épisodes de sécheresse mortels pour les espèces vivantes.
– Des phénomènes côtiers et urbains d’étuve tropicale qui augmentent la température ressentie et dont l’impact sanitaire sera de plus en plus important.
– Une modification importante des écosystèmes terrestres (certaines cultures traditionnelles ne seront plus possibles sur le littoral corse, certaines essences d’arbres pourraient disparaître au profit des conifères).
– Un appauvrissement des sols affectant la capacité de production agricole.
Consommer ou survivre ?
Nous ne cesserons de le répéter, un système économique qui prône une consommation de ressources infinies dans un monde fini, ne relève pas de la raison mais du délire suicidaire. En Corse comme ailleurs il est urgent de rompre avec les logiques auxquelles souhaite nous assigner le Capitalisme. Le Peuple Corse doit rompre avec cette logique de croissance économique des secteurs du tourisme, de l’immobilier et de la grande distribution imposée par le modèle capitaliste européen et relayée par les profiteurs insulaires.
Notre survie à moyen terme dépendra de notre capacité à investir massivement dans une production vivrière raisonnée et respectueuse de l’environnement. Tout ce qui peut être recyclé doit l’être en Corse. L’université de Corse doit définir la recherche en bio ingénierie autocentrée comme un axe stratégique majeur.
La tempête Adrian ne peut en aucune façon être comparée aux anciennes tempêtes connues en Corse (ex : 1979) qui résultaient de rencontres aléatoires entre les masses d’air polaire et les masses d’air saharienne. Cette tempête nous plonge dans une nouvelle ère. La Corse fait son entrée dans la crise de l’anthropocène, une ère de l’évolution de la Terre résultant de l’activité de l’homme et générant un effondrement exponentiel du vivant (60% des vertébrés ont disparu en 40 ans) et un dérèglement climatique accéléré.
Nous pouvons encore collectivement organiser les moyens de notre survie, mais cela passe par une révolution politique et culturelle. A chacun de prendre ses responsabilités.
A Manca.