L’image spectaculaire de militants communistes, anarchistes et environnementalistes lourdement armés accompagnant une manifestation antifasciste dans une ville de l’Ohio doit être contextualisée dans le cadre plus global de la défense de la liberté d’expression et des minorités. Ce qui se passe aux USA et au Brésil mérite d’être analysé froidement. Là où les populistes arrivent au Pouvoir en étant activement soutenus par les franges les plus radicales de l’extrême droite, la violence contre les opposants se déchaîne.
Aux États-Unis, on recense 4 morts pour 100000 habitants par an, mais pour les années 2017 et 2018 on estime que les violences d’extrême droite ont fait plus de victimes que les attaques jihadistes. L’arrivée au pouvoir de Trump a favorisé le passage à l’acte des suprématistes blancs nourris par une rhétorique raciste et antisémite. Non seulement Trump a repris à son compte l’idée d’une « invasion » de migrants, mais il a refusé de condamner les manifestations d’extrême droite à Charlottesville en août 2017. 40 militant(e)s de gauche et/ou personnes issues de minorités ethniques ou religieuses ont été assassinées en 2018.
Au Brésil l’assassinat politique était déjà une pratique courante de la police-militaire noyautée par les courants néo-fascistes locaux. Depuis l’arrivée de Bolsonaro les statistiques ont explosé ; 435 militant(e)s de gauche, écologistes, indigènes ou issus d’autres minorités ont été assassinés en quelques mois.
Bien sur la situation n’est pas comparable en Europe. Nous n’en sommes pas encore là car nous sommes toujours libres d’exprimer nos opinions sans être menacés de mort par les nervis néo-fascistes. On constate une montée en puissance des agressions politiques dans la sphère publique en Hongrie, en Pologne et même en Italie. Cependant l’assassinat reste une pratique isolée, même si les sites internet de nombreux groupes néo-nazis appellent ouvertement au meurtre. Parallèlement, sous couvert de lutte anti-terroriste et de respect des institutions le délit d’opinion devient une réalité en France, où l’État policier s’affirme un peu plus chaque jour.
La question que doit se poser tou(te)s les militant(e)s des droits de l’Homme et/ou investi(e)s dans la lutte antifasciste est celle du risque politique lié à la montée des populismes en Europe. Comment défendre les libertés individuelles dans un contexte probable de prise de pouvoir par l’extrême droite ? Cela passe nécessairement par l’auto organisation. Si une situation locale et le recours légitime aux armes n’est pas transposable dans notre pays, il y a cependant des enseignements à tirer de l’initiative des antifascistes américains.
Face à la preste brune, ces militant(e)s de gauche choisissent de mettre leurs divergences de côté et d’organiser solidairement la résistance. A méditer.