L’annonce de l’auto- dissolution du FLNC s’inscrit dans une actualité politique marquée principalement par les positionnements du gouvernement. Le préfet de région en a d’ailleurs récemment précisé les grandes lignes. Avant tout, elles consistent à repousser fermement les trois perspectives suivantes:
– l’instauration de la co-officialité
– le statut de résident
– la modification de la constitution
Le ministre de l’intérieur est donc venu exposer la position du chef de l’Etat et du gouvernement. Rien ne permet pour l’heure de spéculer sur d’improbables lignes de partage qui seraient le fait de « progressistes » et exprimeraient des voix discordantes au sommet de l’État.
L’actuelle direction du FLNC semble escompter pourtant des positionnements nuancés au sein du gouvernement. Par un geste qualifié de fort, elle entendrait donc peser d’une manière décisive sur d’éventuels débats tout en renforçant la majorité des élus de l’Assemblée de Corse.
Le débat relatif à l’utilité et à l’usage de la violence politique est aujourd’hui dépassé. Un clivage s’opère désormais entre les « progressistes » et les partisans du statu quo.Cela se traduit d’ailleurs par le salut et l’approbation unanimes des courants dits « modérés » et « radicaux » face à l’initiative du FLNC.
Sur les versants économiques et sociaux, l’actuelle direction du FLNC, pointe avec justesse diverses problématiques en matière de logement, d’emploi et de fiscalité. Les pistes, les solutions possibles qu’elle propose témoignent d’une vision globale de la société estompant les clivages de classe au profit d’une démarche nationaliste destinée à défendre l’intérêt, présenté comme commun, de tous les Corses.
Les préconisations concernant la lutte institutionnelle sont assez clairement exposées. Le moyen terme y est dessiné en matière d’alliances (listes communes privilégiées avec le courant autonomo -régionaliste).Le pluralisme politique y étant présenté comme une bi- polarité entre cette tendance et le courant indépendantiste évoqué au travers de l’organisation existante. Notons que le principe de l’autodétermination n’est pas revendiqué.
Nous prenons donc acte de cette démarche, d’autant que nous avons appelé à la dissolution des organisations dites clandestines depuis septembre 2005. Cet appel envisageait également un possible débat destiné à réfléchir sur le concept de violence politique en tenant compte des contextes. A ce niveau, nous ne pouvons que déplorer l’absence de réponses.
Nous constatons que le maintien de la clandestinité s’est opéré avec en toile de fond un argumentaire en forme de référence permanente à la résistance face au colonialisme. La vie politique de notre pays n’étant pas à un paradoxe près, c’est précisément dans une des périodes les plus sombres qu’est affirmé le renoncement à un terrain de lutte.
En effet, confronté aux politiques des libéraux corses, français et européens, le peuple corse connaît une précarisation à l’échelle de masse. Celle-ci résulte d’une économie résidentielle fondée sur le tout-tourisme et une mise en coupe réglée du territoire liée aux intérêts spéculatifs du BTP et du grand banditisme. Sur fond de délitement du lien social, le peuple corse voit ses anciens finir leurs jours dans des EPHAD et les plus jeunes privés de leurs droits élémentaires (emplois dignes, accès au logement et à la culture).
Dans un tel contexte, le redéploiement sur le terrain des luttes publiques (mobilisations sociales, environnementales, culturelles) est également affirmé dans la communication du FLNC. Nous en sommes pleinement satisfaits dans la mesure où une dramatique désertification frappe le champ des mobilisations de masse depuis au moins deux décennies.
L’opportunité d’un réinvestissement de ces champs d’actions par des patriotes se présente. Cette démarche doit tenir compte de celles et ceux (comme par exemple les associations de défense de la loi littoral) qui œuvrent depuis des années à la survie de nos espaces naturels collectifs.
Il sera nécessaire de prendre en compte un pluralisme politique au sein du mouvement national. Cette prise en compte ne peut en aucun cas faire l’impasse sur toutes les organisations existantes. Si des projets de société commencent à émerger dans le mouvement nationaliste, nous sommes cependant toujours en attente d’affirmations à même de permettre au peuple corse d’exercer pleinement ses choix.
Pour notre part, le droit à l’autodétermination et la mise en œuvre d’un projet socialiste et autogestionnaire constituent les pierres angulaires d’une stratégie émancipatrice qui passe encore et toujours par un rapport de force autour des intérêts fondamentaux des classes populaires.
Nous lançons ce jour un nouvel appel au renforcement du courant pour l’autodétermination et le socialisme afin de préparer les ruptures incontournables avec les pouvoirs clanistes, coloniaux et capitalistes. Ensemble sur des bases claires, une alternative est possible !
A MANCA