CEUX DONT ON NE DOIT PLUS PRONONCER LE NOM.
En politique comme dans d’autres domaines, les mots donnent du sens et structurent la pensée. En Corse comme ailleurs la bataille des mots est un aspect primordial de la lutte d’émancipation du peuple corse.
Aux temps de la République Paoline on parlait bien de Naziunali pour désigner les hommes et les femmes faisant partie de la Nation Corse. Bien sur, le mot nation n’avait pas la même signification à l’époque, mais il permettait de distinguer les communautés en fonction de leurs origines géographiques, que ce soit à l’échelle d’une cité où d’un Etat. En Corse les Naziunali revendiquaient à la face du Monde la liberté de s’administrer par eux-mêmes et de ce fait la Nation était indissociable du projet d’indépendance politique.
En 1781, 12 ans après la conquête militaire de la Corse, Versailles a compris cet enjeu et a promulgué un édit royal demandant à tous les fonctionnaires du Roy en poste dans l’île de proscrire l’usage dans toute communication du terme ‘Nation corse’.
Après le riaquistu des années 60 et lors de l’émergence des différentes formes d’organisations dans le cadre de la Lutte de Libération Nationale, c’est surtout la notion de Peuple Corse qui a été mise en avant. Dans le contexte du Droit international et de résolutions de l’ONU, la notion de Peuple Corse permettait de revendiquer un droit légitime et démocratique à l’Autodétermination. La plupart des revendications pour des droits politiques nouveaux, notamment sur le plan institutionnel, s’inscrivaient dans ce cadre.
Paris ne s’y est pas trompé et en 1991 le Conseil Constitutionnel a censuré l’emploi du mot ‘Peuple Corse’, considérant que le peuple Français ne se composait que de citoyens français sans distinctions.
De nos jours la seule proposition d’évolution institutionnelle de Macron est d’intégrer ‘La Corse’ dans la constitution française, il ne s’agît nullement ‘des Corses’, mais bien de la sanctuarisation définitive d’un territoire, d’une prise de guerre. On arrive au bout du processus d’assimilation à travers la bataille des mots.
Le contexte sanitaire actuel est très révélateur de cette nouvelle étape, notamment en ce qui concerne la distinction des flux de personnes testées à la COVID19. Il y a d’un côté les « touristes » et de l’autre les « locaux » ou les « résidents ». Ce sont les deux termes génériques utilisés par les services de l’Etat et les médias ‘mainstream’. Il n’y a plus de « Corses » qui apparaissent dans ces communications au sujet de la situation sanitaire en Corse, et cela est loin d’être anodin.
C’est sur le terrain et au quotidien qu’un démenti doit être apporté si l’on considère que le peuple corse est toujours une communauté vivante.
A l’instar d’autres Peuples sans Etats, c’est aussi au niveau international que la bataille des mots doit être amplifiée. La négation des droits et aspirations démocratiques du Peuple Corse par la France doit faire l’objet d’un lobbying stratégique.
Le tête-à-tête avec Paris ne peut être que mortifère, car la volonté d’assimilation du peuple corse est on peu plus claire et cette vieille puissance impérialiste a pour elle la Force, la Loi et surtout le Temps…
A Manca