À l’invitation de Core in Fronte, s’est tenue une réunion/débat. Quelques 800 personnes ont répondu à l’appel.
Étaient présents des membres de la famille de Massimu Susini, militant assassiné pour s’être dressé contre les agissements d’une bande de voyous locale, elle-même en lien étroit avec des membres de la pègre basés sur Aiacciu. Cette information atteste bel et bien de l’origine crapuleuse des auteurs et commanditaires de cet assassinat.
Se sont également exprimés des élus de la CdC, un des animateurs et des membres du collectif « Maffia nò, a vita iè » créé il y a peu, des membres d’associations de défense de l’environnement, des personnes à titre individuel et des portes paroles d’organisations politiques.
L’introduction aux débats a été faite par Paulu-Felice Benedetti de Core in Fronte. Ce dernier a clairement rappelé que Massimu Susini était un militant de la cause corse et un travailleur enraciné sur sa terre. Il a également évoqué les 370 personnes tombées sous les balles de tueurs ces dernières années. Son propos a été aussi de dire que malgré la rage et la colère (légitimes) que nous pouvions tous ressentir, il importait de trouver un débouché politique, à la situation que subit toute la société corse, situation faite de la prégnance toujours plus importante, de ce que d’aucuns nomment en tant que Maffia.
Ghjuvan’Santu Plazenzotti, l’oncle de Massimu Susini, a fermement rappelé à toute l’assemblée que personne n’était désormais à l’abri d’exactions pouvant être perpétrées par des bandes, jugeant pour sa part qu’il s’agissait bien d’un phénomène maffieux.
Les propos et les faits nous obligent à dire que les interventions des élus de la CdC n’ont pas été à la hauteur des enjeux. Questionnés par de multiples intervenants de la salle, ils se sont bornés à affirmer qu’ils remplissaient au mieux leurs fonctions d’élus.
Cela, jusqu’à la remarquable intervention d’un avocat, membre par ailleurs d’une association de défense de l’environnement. En effet ce dernier a très justement dénoncé l’inertie des élus nationalistes de la CdC, pourtant régulièrement interpellés par de multiples associations de défense de l’environnement. Il a mis à mal, les arguments de ces derniers en faisant une mise au point : Oui, l’institution régionale et ceux qui en ont la responsabilité majeure, ont les moyens juridiques de s’opposer aux phénomènes spéculatifs sur le foncier. Reste qu’ils ne les utilisent pas.
Cette intervention très applaudie par la salle, nous amène également à poser la question la plus simple : Pourquoi des élus, nationalistes de surcroît, n’utilisent-ils pas les moyens à leur disposition ? Sont-ils sous pression ?
Y a-t-il une porosité entre le monde politique, certaines formations politiques nationalistes et la voyoucratie ?
Faute de réponses claires la majorité actuelle de la CdC prend le risque de :
Se déconsidérer non seulement aux yeux des nationalistes mais plus largement aux yeux du peuple corse. D’être définitivement l’otage du milieu.
Le porte parole d’a Manca, seul à avoir évoqué le colonialisme comme une des causalités de la destructuration de la société corse, a axé son intervention sur plusieurs points. C’est le capitalisme, aujourd’hui « libéré » de toutes contraintes qui crée le terreau sur lequel prolifère la pègre. L’État Français exerce pleinement ses droits régaliens (a contrario de ceux qui dénoncent sa prétendue apathie) et il gère la situation car il en tire un bénéfice majeur à ses yeux : pousser le mouvement nationaliste à la défaite en laissant pourrir le climat sociétal. Ses pouvoirs régaliens s’exercent pleinement dans le cadre de la terminaison d’un processus d’intégration coloniale, y compris en laissant proliférer la voyoucratie, comme cela a déjà été fait par d’autres puissances colonialistes pour briser les peuples. Enfin, c’est en bâtissant un projet alternatif que les forces vives du mouvement d’émancipation sont seules à même de favoriser une issue politique et d’opposer une société de droit à la situation actuelle.
Le bilan de cette réunion, est positif. La parole s’est vraiment libérée, sans tabous. Les conditions commencent à être réunis pour un sursaut vital, fondé sur la mobilisation populaire. La majorité régionale est mise en demeure de clarifier ses positions.
Un premier collectif de lutte contre la Mafia, enraciné dans la société va se créer le 5 octobre prochain à Carghjese. Initiative que nous appelons à soutenir massivement et à laquelle nous répondons en étant présents à sa première réunion.
Reste néanmoins que c’est un combat décisif qui commence car la dégradation de la situation est telle que la menace d’autres actions criminelles est bien réelle.
C’est à la spéculation immobilière, aux tentatives de prédation sur les espaces mer et montagne, aux extorsions de fond, et au détournement de l’argent public, auxquels il nous faut collectivement mettre un terme.
Comme nous ne cessons de l’asséner, la perspective étant un vrai changement de société et sûrement pas la moralisation d’un système qui porte en lui, de par sa nature profonde, les maux qui menacent toute une société.
La problématique qui reste en suspens est celle de la consommation massive de stupéfiants et des flux d’argent qu’elle génère. La solution n’est sûrement pas un réflexe milicien qui confondrait les victimes et les tenants des trafics.
Rappelons nous qu’au Venezuela, par exemple, des mesures audacieuses ont été adoptées. C’est dans cette direction qu’il nous faut aller pour assécher le terreau sur lequel prolifère la pègre.
Aujourd’hui, les enjeux imposent la mobilisation de toutes et de tous, pour une solution politique populaire, seule à même de mettre en échec la voyoucratie et cet État Français qui tente de nous engluer dans un marasme mortifère.
A MANCA