EFFACEMENT DE LA DETTE CONTRE LE RACKET NEO-LIBERAL
Depuis plusieurs mois des économistes issus de différents courants de pensée proposent un effacement pur et simple de la part de la dette publique des États européens détenue par la Banque Centrale Européenne. Récemment une centaine d’entre eux a lancé un appel pour réclamer cette mesure visant à prévenir un effondrement économique.
Cela n’a rien de révolutionnaire car même la conseillère économique libérale, Anne-Laure Kiechel estime que ce n’est pas la question de l’annulation d’une dette publique qui pose un problème en soi, mais plutôt de bien définir l’objectif de cette mesure. En effet, depuis l’Antiquité, différentes formes de pouvoirs politiques ont eu recours à l’effacement de leurs propres dettes, quels que soient leurs créanciers, en fonction de situations particulières ou de l’invocation de la notion de « dette injuste ».
On comprend bien que dans la situation économique et sociale aggravée par la crise sanitaire, l’effacement de la dette publique pourrait permettre de relancer l’investissement, notamment au niveau des services publics sinistrés. Mais ce que nous ne pouvons admettre, c’est que le secteur bancaire privé soit quant à lui totalement exonéré de tout effort de solidarité face à une situation exceptionnelle, ce d’autant plus lorsque l’on sait à quelle hauteur les tenants de ce secteur ont été soutenus par l’argent public. De plus, le capitalisme financier a une responsabilité écrasante dans la précarisation structurelle de la recherche publique et la désorganisation des systèmes de santé face aux crises sanitaire de type COVID.
Deux raisons expliquent l’envol des dettes contractées par les Etats. D’abord, les politiques fiscales ont réduit massivement les impôts des riches et des entreprises. S’y sont ajoutés les avantages qui ont été consentis à ces dernières. La deuxième source d’augmentation de la dette s’avère être les aides obtenues par les banques et les entreprises durant la crise financière de 2008 : par ce tour de passe- passe, la dette privée est devenue une dette publique.
Alors pourquoi devrions-nous payer pour les classes dominantes et tous les profiteurs ?
Un progrès semblait possible. Mais voilà, avant-hier, une gardienne du temple néo-libéral, Christine Lagarde, a opposé une fin de non- recevoir à l’idée même d’annulation des dettes publiques. L’actuelle présidente de la Banque centrale européenne (BCE) estime « qu’il s’agirait d’une violation du traité européen qui interdit strictement le financement monétaire des Etats. Cette règle constitue l’un des piliers fondamentaux de l’euro ». L’ex-patronne du Fonds monétaire international (FMI) rappelle que » Depuis le traité de Maastricht, l’Europe proscrit le financement monétaire des déficits publics ». C’est un exemple criant de ce que peut produire l’aveuglement idéologique face à la notion de primauté du Bien Commun.
Comble du cynisme, pour Christine Lagarde, « il ne fait aucun doute » que les pays de la zone euro « parviendront » à rembourser cette dette. « Les dettes se gèrent dans le temps long. Les investissements réalisés dans des secteurs déterminants pour l’avenir engendreront une croissance plus forte », estime-t-elle. On ne voit vraiment pas comment des États surendettés par les banques pourront soutenir une politique d’investissement socialement utile. Cette cadre du capitalisme nous explique en fait qu’il faut encore plus de croissance et donc plutôt miser sur les secteurs compétitifs. C’est comme si aucun avertissement n’avait été donné par l’ONU sur l’urgence absolue de sortir de ce modèle économique fondé sur la croissance, qui menace directement l’existence du vivant sur Terre.
Même quand ils sont alertés par les plus éclairés de leur propre camp, les capitalistes purs et durs comme Christine Lagarde maintiennent leur ligne idéologique quel qu’en soit le prix que d’autres s’apprêtent à payer bien malgré eux.
Plus que jamais, la rupture avec le dogme capitaliste et ses promoteurs relève d’une urgence vitale.
A Manca