Les élèves et les personnels de nombreux établissements scolaires de Corse ont manifesté ces dernières semaines leur colère et souffrent à juste titre de la vision comptable de l’éducation qui règne au ministère comme au rectorat. De cette vision libérale qui veut démanteler le service public d’éducation et organiser l’Ecole sur le modèle de l’entreprise, découle depuis de longues années, la mise en œuvre d’une politique générale de restrictions des budgets et de précarisation planifiée des personnels.
En tout premier lieu, un des volets significatifs d’un telle politique demeure en Corse la dotation horaire globale (DHG) ventilée par le Rectorat. Cette dotation, dont chaque établissement se voit pourvu vers février-mars, rogne tous les ans davantage et de manière pernicieuse (on réduit les heures correspondant à des postes pleins pour titulaires) les moyens horaires dévolus aux collèges et aux lycées sous le fallacieux prétexte d’en rationaliser la gestion.
Faut-il rappeler que nos élèves ne sont pas des statistiques mais des citoyens en construction qui nécessitent un accompagnement de qualité ? Faut-il rappeler que la géographie, la démographie et la sociologie de la Corse imposent la prise en compte de spécificités, ainsi que le demande depuis des années le STC, lorsqu’il évoque la mise hors norme de l’Académie ? En effet, le caractère enclavé des micro-régions du rural et les temps de transports imposés qu’il implique doivent être ainsi évalués à leur juste mesure. De même, lorsque l’on sait que 20% des Corses sont pauvres, on doit être attentif à ce que les inégalités économiques et sociales ne viennent pas se rejouer dans le domaine éducatif et reproduire les situations de misère.
Selon la même logique, le deuxième volet est le sort réservé aux filières bilingues. Faute d’une généralisation du bilinguisme, la politique menée sur ce terrain équivaut à un « saupoudrage » effectué au cas par cas, en fonction des rapports de force existants et de fait, très variable d’un territoire à l’autre. Cette politique des « petits pas et des petits bras » ne saurait permettre sérieusement la transmission, la promotion ni même la valorisation de la langue corse dans et par l’Ecole. Il y a donc loin de la coupe aux lèvres.
Enfin, et il s’agit peut-être de la situation la plus préoccupante car privant notre pays d’une partie de ses cadres et de ses forces vives intellectuelles, les jeunes enseignants débutant leur carrière se voient plus que jamais contraints à l’exil dans les villes françaises, sans que soient le moins du monde pris en compte les besoins de notre pays. Ainsi, pour ne citer qu’un exemple, bien des conseillers principaux d’éducation (CPE), -pourtant rouages essentiels en charge de la vie scolaire en dehors des heures de cours-, sont envoyés à Créteil ou Versailles alors que la Corse a de grands besoins en la matière et reçoit dans le même temps des CPE venant d’autres académies.
En conséquence, A Manca dénonce la casse généralisée du service public d’éducation que l’on privatise silencieusement et son corolaire, la politique néocoloniale menée par le ministère de l’Education. Notre mouvement apporte son soutien à tous les personnels qui se battent au quotidien pour faire vivre la langue corse sur son territoire et de façon générale, afin de rendre possible un enseignement de qualité qui place les besoins de l’élève au cœur des préoccupations.
A Manca