Les trois principaux faits à retenir du scrutin en Écosse sont :
Un effondrement des nationalistes du SNP (- 21 sièges) qui demeure cependant la première force politique du pays.
Une percée historique des conservateurs Tories, la Droite pro-Londres enregistrant son meilleur score depuis 1983.
Une remontée spectaculaire de la Gauche (Labour) dans les quartiers populaires.
Ruth Davidson, la chef de la Droite anglaise fanfaronne sur le thème « Le projet d’indépendance est mort ». C’est aller un peu vite en besogne et ne pas tenir compte de la nature des différents votes qui se sont exprimés.
Deux raisons majeures expliquent le poids du vote conservateur. D’une part, un vote populiste multiforme s’est exprimé massivement contre une Europe jugée laxiste face aux questions de sécurité, dont les immigrés sont rendus responsables. Ce syndrome de la citadelle assiégée a été boosté après les récents événements de Manchester et de Londres. Ce vote a aussi reçu un apport très important des retraités écossais qui ne sont toujours pas convaincus de la capacité des Nationalistes à maintenir leurs pensions en cas d’Indépendance. C’est donc le vote de toutes les peurs qui a profité à la Droite anglaise en Écosse. C’est ce qui explique qu’une star du Football local comme Douglas Ross ait pu ravir un siège de Député à Mr. Robertson, figure historique du nationalisme écossais.
Cependant, tous les Écossais qui n’ont pas voté pour le SNP ne sont pas mécaniquement hostiles à l’indépendance. C’est bien une partie de la base électorale du SNP qui s’est massivement reportée sur le vote Labour (6 sièges SNP sont passés au Labour). Il est important d’en déterminer les raisons.
Le phénomène ne doit pas être sous-estimé, la Gauche enregistrant une progression de 15 000 voix dans les quartiers populaires d’Édimbourg, mais plus encore dans la région de Glasgow. Là, de nombreux travailleurs et chômeurs qui avaient voté SNP en 2015 ont massivement voté pour le Labour. De nombreux députés SNP ont été talonnés par le Labour et ont conservé leurs sièges de peu. C’est le cas de la plus jeune député écossaise, Mhairi Black, dont l’écart de voix avec le Labour est passé de 6 000 à 2 500 hier soir. Comment expliquer ce transfert de voix massif du SNP vers le Labour ?
Il y a deux explications complémentaires. Comme cela a été le cas dans toute la Grande Bretagne, la ligne de Gauche anti-austérité incarnée par Jeremy Corbin a remobilisé l’électorat populaire en faveur du Parti Travailliste. Cette ligne clairement positionnée contre l’Europe libérale, la casse des services publics et pour la défense des droits sociaux a été plus lisible pour bons nombres de Nationaux Écossais. A contrario, le SNP, en alignant la défense de la souveraineté écossaise à l’allégeance au modèle européen actuel, a été perçu comme non-critique face aux politiques dévastatrices du Capitalisme Européen. Un des arguments de campagne du SNP était que le maintien dans le marché commun allait préserver 80 000 emplois en Écosse. Cette erreur de stratégie du SNP a été lourdement sanctionnée au profit du Labour.
C’est la principale leçon de ce scrutin. Les droits fondamentaux des individus ne sont pas solubles dans l’identité. Le Projet National écossais gagnera en crédibilité s‘il se positionne clairement sur la Question Sociale en ayant un programme clair sur les acquis sociaux, retraites, services publiques et donc, un positionnement sans ambiguïté contre les politiques d’austérité de Bruxelles. La Lutte de Libération Nationale est donc indissociablement liée à la Lutte de Libération Sociale, car si elle ne correspond plus aux intérêts populaires, elle est tôt ou tard sanctionnée.
A MANCA