Dans l’état actuel des choses, les éléments d’informations liés aux événements qui se sont déroulés sur la commune de Siscu, ne permettent pas de faire toute la lumière sur l’enchaînement des divers faits de violences qui s’y sont déroulés. La seule chose clairement établie est le comportement agressif et de deux individus ayant voulu jouer les caïds aux dépens de touristes et de jeunes adolescents de Siscu, agression condamnable sans aucune réserve, tout comme doit l’être la tentative de lynchage qui s’en est suivie.
La profusion de communiqués qui ont émané d’organisations politiques et d’élus, loin de contribuer à créer les conditions d’un apaisement des tensions, participe, bien au contraire, à une surenchère plus qu’inquiétante.
Encore une fois, c’est à partir de communications diffusées via les réseaux sociaux que se sont enchaînées les réactions. L’écho quasi instantané enregistré dès la diffusion de ces messages atteste, plus que d’un malaise, de l’extrême tension qui agite de larges franges de notre société. Un processus d’escalade de violences de toutes natures et de toutes origines s’est enclenché. Il est à redouter que des faits irréversibles dans leurs conséquences ne se déroulent.
A l’évidence, le piège tendu par des fanatiques d’inspiration pseudo-religieuse et une extrême droite polymorphe, fonctionne. Les clivages au cœur de notre société sont désormais en voie de concrétisation et c’est en l’occurrence le but poursuivi par des courants politiques en totale connivence idéologique.
De plus, nous constatons, que la quasi-totalité des partis et personnalités politiques qui se sont exprimés, le font en s’auto- proclamant représentants du peuple et ce dans sa globalité. Le même phénomène concerne des chroniqueurs qui à longueurs de médias, prétendent, sans précaution aucune, se faire les porte- paroles et les interprètes de ce qu’ils affirment être « l’opinion publique ». Or si l’émotion prend souvent le pas sur la réflexion, il apparaît cependant que des pans entiers de notre société demeurent sur une réserve, elle-même fondée sur des questionnements et des valeurs qui ne participent pas à des conclusions aussi manichéennes que dangereuses. Et c’est cette population que d’aucuns tentent de prendre en otage.
Les lignes « traditionnelles » qui permettaient d’identifier, au moins dans l’apparence de leurs postures des camps politiques, sont brouillées. Un consensus autour de réflexes purement sécuritaires s’est instauré. Nous en voulons pour preuve, les pathétiques déclarations d’organisations d’obédience nationaliste qui, peuvent tout à la fois dénoncer les politiques répressives de l’Etat Français et en appeler à ce même Etat afin qu’il déploie des moyens et des politiques afin de garantir la sécurité du peuple corse.
La complexité de la situation politique demande pourtant que soient abordées les problématiques de fond, aussi bien au niveau local qu’au niveau international.
Jusqu’à présent, les guerres pour la captation des matières premières se déroulaient sur des théâtres d’opérations éloignés de nos lieux de vie. Bien imprudents, naïfs, responsables directs et complices objectifs sont celles et ceux qui n’ont pas imaginé ou anticipé le fait qu’un jour ces conflits déborderaient sur l’ensemble de la planète. Et ce sont les peuples qui en payent l’effroyable tribut. La responsabilité première de cette situation est portée par les Etats de l’Occident politique, eux-mêmes bras armés des multinationales, des milieux de la finance et donc d’une minorité de profiteurs, uniquement préoccupés par la défense de leurs intérêts particuliers.
La mouvance politico-religieuse qui se revendique de l’Islam, qu’elle soit liée à des Etats théocratique ou organisée sous d’autres formes, a été et peut encore être utilisée par les gouvernements de l’Occident politique. Elle se veut incarner aujourd’hui la résistance à l’impérialisme, mais sur le fond,il ne s’agit que d’une lutte de pouvoir qui ne remet en rien, en cause, le système capitaliste. Comme Al-Qaïda, la nébuleuse Daesh est un monstre qui a échappé à ses créateurs. De tous temps, les puissances réactionnaires occidentales ont joué l’obscurantisme religieux contre les mouvements réellement émancipateurs. Il est donc hors de question de faire un choix entre que ces deux faces d’un même système. Le choix ne doit pas se faire entre la lèpre ou le choléra. L’alternative, seule à même d’établir une paix durable, passe par des mobilisations et des combats contre ces deux configurations. La poursuite des politiques actuelles ne peut avoir comme conséquences que l’instauration de gouvernements, soit de nature néo-fasciste en Occident, soit de nature islamo-fasciste au niveau du Moyen-Orient. C’est à ce pseudo choc des civilisations que rêvent, tous les réactionnaires qui s’affrontent tant au niveau idéologique qu’au niveau économique et militaire.
S’il convient d’interdire aujourd’hui à l’intégrisme religieux toute possibilité d’interférence dans les affaires publiques, il convient également de nier aux courants néo-fascistes toute légitimité et ce dans tous les domaines. La paix dépendra de volontés collectives afin d’imposer à nos propres gouvernements la cessation des politiques qu’ils poursuivent : captation des richesses minières, soutien à des dictatures, vente d’armes et interventions militaires. La solidarité populaire doit s’exercer à l’égard des milliers de femmes, d’hommes et d’enfants, qui chassés de leurs lieux de vie par ces conflits risquent leurs vies et sont de plus victimes de tous les ostracismes. Le combat pour l’égalité entre les femmes et les hommes est également au cœur des problématiques de l’heure. Le rejet de toutes les formes de xénophobie et de racisme et contre toutes les formes de discrimination fait intégralement partie de la lutte d’émancipation du Peuple corse.
A Manca en appelle donc à toutes celles et ceux qui, animés par les valeurs de justice sociale, d’amitié entre les peuples et de paix à se mobiliser, tant au niveau immédiat que sur la perspective d’un changement radical de société. Seule une alternative socialiste, démocratique et autogestionnaire peut faire barrage à la barbarie.
A MANCA